En bien ou en mal, l'essentiel, c'est qu'on parle de lui et de ce remède, censé guérir du sida. Christian Cavalli, président de l'association périgourdine Sidaventure, l'affirme tranquillement. Cet habitant de Saint-Michel-de-Double, près de Mussidan, va être à nouveau entendu cette semaine par les gendarmes qui agissent dans le cadre de l'instruction d'une plainte contre X déposée à Paris pour « exercice illégal de la médecine et de la pharmacie » et « mise en danger de la vie d'autrui » (lire « Sud Ouest » du 5 février).
Dans sa maison au milieu des champs, il invite le visiteur à s'installer à la table du salon. Juste à côté, est posé l'ordinateur devant lequel il passe ses nuits « à discuter avec des malades du sida ». Son association compte plusieurs centaines d'adhérents. Son site est dénoncé par l'Adfi de Périgueux, association de défense de la famille et de l'individu, qui lutte contre les sectes. Il a aussi déclenché une mise en garde de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, pour « mise en danger de la vie d'autrui ». Sur une des pages d'accueil, est présenté un remède miracle provenant de Madagascar, « à base d'une dizaine de plantes ». Surtout, il est expliqué que dans le cadre du protocole, les malades « doivent, pendant deux mois et sous surveillance médicale, arrêter leur trithérapie ».
« Pour quelle vie ? »
C'est pourtant grâce à ce traitement « classique » que, vingt-cinq ans après avoir été contaminé « par transfusion sanguine », Christian Cavalli est en vie. En 1995, il apprend qu'il est porteur du VIH depuis dix ans. Il vient de s'installer à Saint-Michel-de-Double et est sur le point de se marier. Les médecins lui donnent alors « cinq ans à vivre ». Les avancées médicales ont permis de repousser l'inéluctable. « Mais pour quelle vie ? » interroge-t-il, évoquant les effets secondaires très lourds : « Je n'ai plus de muscles. Ces médicaments enlèvent l'appétit, provoquent des dépressions. »
Toutes ces années, ce « non croyant » en une religion, mais convaincu par la voyance, s'est donné une mission : « accompagner les malades ». En 2000, après plusieurs actions en faveur de malades, il lance Sidaventure, un site Internet de rencontres. « Quand on a le sida, on vit avec la peur permanente de transmettre la maladie à son conjoint », explique le créateur du site, qui se félicite d'être à l'origine de la formation de plusieurs couples. Au volant de son camion orné d'une croix rouge, il sillonne aussi la Dordogne et la Gironde, jusqu'en 2009, pour faire « de la prévention ». L'association obtient même « un local à l'hôpital de Libourne ». Aujourd'hui, l'hôpital lui a demandé de rendre les clés. Le camion reste garé dans ce coin de verdure.
Obtenir des essais cliniques
Mais Christian Cavalli a un nouveau combat : obtenir des essais cliniques pour ce fameux « remède » venu de Madagascar. « Qu'on me prouve, qu'il n'est pas efficace ! » assure celui qui est allé jusqu'à écrire au président des États-Unis, Barack Obama, pour plaider sa cause. Le Périgourdin n'a jamais rencontré le médecin qui l'a contacté par téléphone, de Madagascar. Il dit avoir été convaincu par des documents : « J'ai vu les fiches de malades qui ont été guéris. »
Défendre ce remède au risque d'être mis en examen, est-ce une manière de dire son ras-le-bol contre un traitement qui l'épuise ? De garder espoir coûte que coûte ? S'agit-il d'un charlatan qui veut écouler « sa poudre de perlimpinpin », comme l'affirme l'Adfi ? Christian Cavalli rétorque simplement n'avoir « pas reçu 1 euro » dans cette histoire. À 58 ans, il vient de stopper sa trithérapie : « Il m'est déjà arrivé d'arrêter le traitement quelques mois, avant de le reprendre. De toute façon, je n'ai pas peur de la mort. »